Pour les maladies très contagieuses, le choix de se faire vacciner n’a rien de « personnel », contrairement à ce que dit Laraque.
Antoine Robitaille Jeudi, 28 mai 2020 05:00
Le monde moderne est plein d’idées chrétiennes « devenues folles », disait le penseur anglais Gilbert K. Chesterton.
Or, la « folie » semble avoir récemment gagné les idées démocratiques et l’individualisme.
C’est ce qui me frappe dans l’argu-mentaire de l’ancien hockeyeur Georges Laraque contre les vaccins, au micro de Qub, mais aussi dans une mise au point subséquente.
Même si la COVID-19 lui a donné du fil à retordre, il refuserait un éventuel vaccin : « Je ne juge personne qui prend un vaccin [...], c’est un choix personnel », expliquait-il.
Faux
Justement pas ! Pour les maladies très contagieuses comme la COVID-19, le choix n’a rien de « personnel ». Car une masse de gens immunisée grâce à un vaccin est nécessaire.
Pour la rougeole, sous le seuil des 95 % vaccinés, la barrière de protection devient fragile et on risque la propagation.
Richard Martineau, qui recevait Laraque, lui a justement rétorqué : quand tu dis non au vaccin, tu es égoïste, « tu bénéficies du sens des responsabilités des autres ». Surtout dans le cas des maladies comme la rougeole. Ou de la COVID-19.
Esprit critique
Les « idées devenues folles », dans le raisonnement de Laraque : la tolérance, l’esprit critique, la notion de consentement, entre autres.
La tolérance : il fait mine d’accepter que d’autres diffèrent d’opinion avec lui ; un peu comme les dévots après les guerres de religion. Sauf que nous ne sommes pas ici dans le domaine des croyances. Tout n’est pas relatif !
Se faire vacciner ne s’apparente pas à un choix entre manger ou pas de la viande. Le refus du vaccin, pour plusieurs maladies, met carrément à risque des compatriotes au système immunitaire fragile.
Il ne s’agit pas d’accepter tous les programmes de vaccination sans exception. Celui proposé contre les infections par les virus du papillome humain (VPH) fit débat. On a évalué les avantages et inconvénients et on décida d’aller de l’avant.
Mais dans le cas des fameuses sept maladies maîtrisées grâce à la vaccination, revenir en arrière, c’est se mettre stupidement à risque. Et on a beau être « végan » et athlète – comme Laraque –, rien ne garantit qu’une fois malade, on échapperait aux complications. Terrasser le tétanos en mangeant bio ? Voyons !
Plusieurs « anti-vaccins », à l’instar des théoriciens du complot, cultivent l’illusion d’avoir une démarche rationnelle (« faire ses recherches ») par laquelle ils remettent en question une vérité qu’on leur impose.
Mais c’est évidemment un travestissement de cette notion. Sous couvert de « fouiller », ils cherchent n’importe quelle information les confortant.
Ignorer ?
Devrions-nous censurer les incom-pétents qui professent des idées potentiellement létales comme l’anti-vaccination ?
Cela risquerait de les braquer et de les enfermer dans leurs réseaux ; leur donnant le sentiment d’être des résistants détenteurs d’un savoir unique, à qui l’« on cache des choses ».
Il faut bien sûr s’abstenir d’amplifier leur discours en évitant de les mettre simplement en opposition avec des « pro-vaccination ».
Il faudrait peut-être aussi oser la méthode adoptée par Twitter pour certains messages de Trump : ajouter une mise en garde invitant le lecteur à baser son opinion sur les consensus scientifiques et les faits avérés.