Josée Legault Vendredi, 15 mai 2020 05:00 - Pour la première fois depuis le début de la crise à la mi-mars, le premier ministre François Legault s’est enfin éloigné de sa cellule de crise de la capitale nationale.
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Son arrivée à Montréal, l’épicentre de la COVID-19 au Canada, était attendue depuis longtemps.
Sur le plan politique, sa tournée de deux jours est significative. Elle confirme son inquiétude montante face à l’impossibilité d’enclencher un déconfinement graduel de la métropole pendant que d’autres grandes villes canadiennes peuvent le faire.
En point de presse, ses observations le confirmaient. Même au 3e mois de la crise, la baisse du nombre de décès n’est toujours pas « significative » et il manque encore gravement de personnel dans le réseau de la santé et les CHSLD.
M. Legault jure toutefois que le système de dépistage, crucial à la suite des choses, s’améliorerait. Au sujet de la désorganisation sur le terrain du réseau de santé sous les méga-CIUSSS nés des « réformes » Barrette, il dit qu’il faudra se poser des questions sur la gouvernance. Un euphémisme, espérons-le.
Plusieurs retards
Dans l’immédiat, la visite de M. Legault donne surtout la pleine mesure des nombreux retards qui, existant bien avant la mi-mars, ont contribué à ce que la situation à Montréal ne soit toujours pas « sous contrôle ».
Manque d’équipement de protection. État lamentable de certains CHSLD, ignorés en plus dans la stratégie initiale du gouvernement. Pénurie grave d’une main-d’œuvre sous-payée depuis des années. En CHSLD et dans la communauté, une contagion nourrie par la mobilité répandue du personnel entre les établissements. Etc.
Puis, les fameux masques. Dès le 18 mars, le directeur de la santé publique du Québec, le Dr Horacio Arruda, en disait ceci : « Le masque n’est pas un moyen de prévention des infections dans la communauté ». Jusqu’à la fin avril, au lieu d’encourager son bon usage combiné à la distanciation et les consignes d’hygiène, il a aussi continué à le décourager.
Le Dr Arruda étant la voix de la « science », beaucoup de gens l’ont cru, dont le premier ministre. C’était inévitable. Dans une région dense comme le grand Montréal s’est ajouté cet autre retard dans la lutte à la propagation du virus.
Masques
D’où l’objectif premier de la visite de François Legault : convaincre les Montréalais de son intention réelle d’accélérer la lutte contre le virus dans la métropole. C’est une condition essentielle à leur adhésion aux changements de comportement qu’ils devront opérer le temps qu’il faudra.
La clé de cette adhésion résidera cependant dans le concret d’un ralentissement tangible et documenté de la contagion. C’est le concret de l’espoir de jours meilleurs.
Malgré la dure réalité qu’il nous faudra vivre avec la COVID-19 pour un temps indéterminé, les Montréalais ont besoin de pouvoir espérer.
Quant au masque, un des outils nécessaires dans cette lutte, M. Legault espère que son éventuelle distribution massive finira par convaincre une majorité de Montréalais d’en faire leur nouvelle norme sociale.
Dans le cas contraire, il faudra l’imposer plus tôt que plus tard. L’urgence étant ce qu’elle est. On sent que le premier ministre le sait très bien.